On aura tout dit, tout lu, tout entendu à propos de la course Paris-Dakar. Les pour, les contre, ceux qui se moquent de la sécurité, ceux qui feignent de s’y intéresser et de venir en aide à l’Afrique, ceux qui justifient tout et ceux qui condamnent tout ce qui roule… Mais un chiffre demeure. Pesant, précis, incontournable : 48 morts depuis 1979 ! Et un autre est tu : Ce que rapporte tout cela aux médias en général, à la télévision de service public en particulier !
Des concurrents mais aussi des jeunes tués par les bolides même ralentis dans les villages ou sur la piste ensablée de ce Dakar mortel chaque année.
48 dont 17 personnes qui n’avaient rien à voir avec la course. 17 de trop ! Les autres pouvant être considérés comme des accidents du travail en tant que pilotes professionnels diraient quelques cyniques.
La vie a un prix !
On peut avancer tous les arguments pour se donner bonne conscience (les africains aiment le Dakar, l’attendent, en tire des bénéfices y compris que « ces gens là ont un autre rapport à la mort de leurs propres enfants » !!! )
Il n’empêche, une course qui est mortelle chaque année ne s’interdit jamais de repartir sachant que d’autres enfants vont succomber à nouveau.
Certains rétorquent que la route tue aussi en Europe, que les rallyes sont dangereux partout, que l’Afrique aussi a ses morts de la route, etc.
Mais on oublie de dire que Paris-Dakar s’impose à l’Afrique depuis le début et qu’à chaque difficulté de passage, il y a un Monsieur « bons offices », les poches bien garnies pour décider les pays les plus hésitants à laisser passer le Dakar. D’ailleurs cette course est devenue un tel enjeu pour les sponsors divers et surtout les marques autos-motos qu’il n’est plus question d’interdire le Dakar. Ce qui n’est jamais formulé ainsi notez bien. Ni même que l’Afrique n’a jamais été aussi pauvre depuis vingt ans.
Pour quelques sous, la télévision publique dans le coup !
Enfin il y a plus grave : qu’une chaine publique de télévision soit obligée de diffuser cette course mortelle pour respecter un contrat avec ASO qui signe par ailleurs un autre contrat pour le Tour de France avec le même service public, parait aberrant !
La télévision publique n’est donc pas libre de dire non même si certains de ses décideurs en ont envie. Belle liberté du business ! Belle leçon de morale démocratique ! Bel exemple d’aveuglement pour les entreprises qui soutiennent le Dakar et bel acte de courage pour les journalistes chargés de « vendre « l’évènement mortel !
Pour ma part, je refuserai toujours de couvrir le Dakar en tant que journaliste et que citoyen. La clause de conscience de la Charte des Journalistes ce n’est pas pour les chiens !
Reste la question qui fâche pour ne pas dire qui tue : si une bande d’africains assoiffés de sensations fortes sur des bolides surpuissants s’amusaient à dévaler les pentes de nos montagnes parce qu’il n’y a pas l’équivalent dans leurs pays en tuant chaque année deux ou trois de nos enfants, continuerait-on à autoriser cette course pendant plus de vingt ans ?
C’est hélas parce qu’on connait la réponse que la honte nous poursuit un peu plus encore…
vendredi 3 février 2006 par Alain VERNON
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